Des yeux malicieux et fuyants... Elles me regardent, moi aussi... Dans ce bus pour Bethléem. Notre curiosité mutuelle nous conduit les unes aux autres. Qui pourra encore dire qu'il n 'y a pas du bon à être bavardes !
Trajet quotidien incertain
Parties de Jérusalem, ces jeunes filles voilées aux yeux maquillés se rendent à l'Université catholique de Bethléem. Elles s'étonnent que je veuille m'y rendre. "There is nothing..." résume timidement ma voisine. Je m'étonne de leur nombre, elles sont 8 de 18 à 22 ans. Elles vivent à Jérusalem-Est et empruntent chaque jour ce bus pour se rendre à la fac en territoire palestinien. Un trajet de moins de 20 km mais avec toujours la même incertitude : combien de temps ? D'une demi heure à deux heures car il y a un à deux checkpoint israéliens à traverser. Notre bus s'arrête à l'un d'eux. Cette fois, pas de contrôle. Nous repartons.
3200 étudiants dont 3/4 de Palestiniennes
Sur leurs genoux, des livres en anglais et en arabe, elles étudient une des cinq filières proposées à l'Université : santé, commerce, tourisme et hôtellerie, arts et éducation. Au total, 3200 étudiants : Trois quarts sont des Palestiniennes. Trois quarts sont musulmans dans cette université catholique créée et financée par le Vatican depuis 43 ans. "Notre mission n'est pas de convertir lesmusulmans au christianisme. Notre vocation est d'offrir à tous les Palestiniens une formation solide qui leur donnera un métier " explique Frère Peter Bray, néo-zélandais d'origine, recteur de l'université.
Une formation solide, le souhait de ces jeunes filles. Ma voisine aimerait travailler dans le tourisme. Un débouché qui a la cote en Terre Sainte qui reçoit chaque année des milliers de touristes. Trouver un travail, un enjeu dans une ville où le taux de chômage est de 23%. Pour financer leurs frais d'inscription 3500 euros par an, elles peuvent compter sur un système d'aides. Personne ne paie la totalité. Le budget annuel de la fac de 13 millions d'euros reposent sur des subventions et des dons. Le Vatican signe un chèque d'un million chaque année. Les dons proviennent essentiellement des Etats-Unis et du Canada.
Entre
les fontaines et les arbres fleuris,
elles traversent les jardins pour
rejoindre leur amphi. Il flotte comme un air d'insouciance dans cette
université presque comme les autres. Sur certaines façades, des traces
d'impact de balle rappellent pourtant l'histoire mouvementée de la
région.